Georgette Desmarquet, portrait de couple, 1935, tirage pigmentaire d’après plaque de verre au gélatine bromure d’argent, 1″ x 18 cm, coll. Ardi – Caen.

Parmi les très nombreuses photographies de la collection de l’ARDI qui m’ont émue, il y a celle-ci, du fonds Desmarquet.

Pour moi, elle dit tant de choses sur l’appropriation, par « les gens », de cette  technique mystérieuse encore pour eux, voire magique, qu’était la photographie. 

Cette découverte révolutionnaire s’invitait dans leur histoire…la prouesse de l’image fixée, reproduite, le dédoublement de soi, de la mise en scène. Le décor à la fois somptueux et misérable, la tenture toujours la même suivant l’évènement à fixer…mariage, naissance, communion, réunion de famille…et le petit tapis sous les pieds posé sur l’herbe… les personnages « en pied » qui jusqu’à ce jour ne s’étaient vus qu’en portrait ou à mi-taille car dans les familles modestes il n’y avait pas de grand miroir. Et puis la volonté de « porter beau », de donner de soi pour la postérité une image à laquelle on a contribué en choisissant son vêtement, ses accessoires, de la montre à gousset avec sa chaîne, au pendentif de Madame ou au chapeau..et puis une gestuelle qui se veut naturelle malgré le temps de pose.

Pour moi cette photo dit à quel point la photographie est un art majeur qui n’a pas fini de nous surprendre tant il saisit quelque chose de profond en nous qui viole notre consentement, parfois avec bienveillance, parfois avec cruauté. ( Ici avec une grande bienveillance)

Emmanuelle Chevalier

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