Trois aventuriers sur la banquise, mal préparés : ils n’ont pas les habits pour affronter le grand froid, mais obstinés. Trois amateurs et leur soif d’aventure, de découvertes mais surtout leur dignité. Jusqu’au bout, alors qu’ils se savent condamnés, ils continuent à inventorier les espèces animales, végétales, à tenir leur carnet de bord, à prendre des photos, à emballer soigneusement les rouleaux de pellicule pour la préserver, à faire bombance … Ils n’ont renoncé ni à leurs bouteilles de champagne, ni à leurs cravates en soie. Rester debout jusqu’à la fin et témoigner !
De beaux passages sur la photographie ; on y rencontre Nadar, Albert Kahn, Méliès et bien d’autres ; John Hertzberg, photographe et technicien, à qui il revint en 1930 de développer les pellicules recouvrées dans la banquise. Quelle responsabilité ! Mais quelle émotion il a dû ressentir en voyant apparaître sur l’image ces trois hommes disparus trente-trois ans plus tôt !
Un petit clin d’œil à Tarjei Vesaas et son livre Le palais des glaces et tout un chapitre consacré à Léonie d’Aunet, la première femme à être allée au Spitzberg en 1839! Une belle lecture.
Evelyne Kiesow
« À l’été 1930, sur l’île Blanche, la plus reculée de l’archipel du Svalbard, une exceptionnelle fonte des glaces dévoile des corps et les restes d’un campement de fortune. Ainsi se résout un mystère en suspens depuis trente-trois ans : en 1897, Salomon August Andrée, Knut Frænkel et Nils Strindberg s’élevaient dans les airs, déterminés à atteindre le pôle Nord en ballon – et disparaissaient. Parmi les vestiges, on exhume des rouleaux de pellicule abîmés qui vont miraculeusement devenir des images.
À partir de ces photographies au noir et blanc lunaire et du journal de bord de l’expédition, Hélène Gaudy imagine la grande aventure d’un envol et d’une errance. Ces trois hommes seuls sur la banquise, très moyennement préparés, ballottés par un paysage mobile, tenaillés jusqu’à l’absurde par la joie de la découverte et l’ambition de la postérité, incarnent l’insatiable curiosité humaine qui pousse à parcourir, décrire, circonscrire et finalement rétrécir le monde.
Livre d’une richesse inépuisable, aussi poétique que passionnant, Un monde sans rivagepropose un voyage opiniâtre dans les étendues blanches du Grand Nord, un périple à travers le temps en compagnie de ces trois explorateurs et de bien d’autres intrépides, une méditation sur l’effacement et une déclaration d’amour à la photographie dans ses deux mouvements d’aval et d’amont : fixer les souvenirs et réactiver perpétuellement la machine à rêves.» (quatrième de couverture)